Formation « Les 64 histoires intemporelles », créée par le scénariste et directeur littéraire Thibaud Martin. Éclairage sur cette nouvelle approche dramaturgique en interview.
Thibaud Martin débute sa carrière comme monteur de bande-annonce pour le cinéma. En parallèle du montage, il se passionne pour la dramaturgie. Il dévore tous les manuels, suit de nombreuses formations dont celle de directeur littéraire au CEEA. Il dirige ensuite le développement fiction chez Asuna, un fond d’investissement cinéma. Il prend ensuite la direction d’écriture d’ »Alice In Paris », une sitcom diffusée sur TasteMade, une chaine TV américaine. Il continue ensuite la direction littéraire chez France Culture où il supervise l’écriture de plusieurs podcasts de fictions originales. Il est aussi scénariste et a écrit dernièrement un épisode de la série policière « Cassandre » diffusée sur France 3.
Quel est l’objectif de la formation « 64 histoires intemporelles » ?
Thibaud Martin : Avec cette formation, je souhaite offrir aux scénaristes une vue d’ensemble des différentes histoires qu’ils peuvent écrire. Cela les aide à gagner en assurance car ils réalisent que leur histoire trouve sa place quelque part. Savoir qu’une intrigue a déjà été racontée sous une certaine forme peut être rassurant et stimulant.
Comment est née cette approche nouvelle de la dramaturgie ?
T.M : Pour concevoir cette formation, j’ai analysé plus de 1000 films, principalement des œuvres cinématographiques. Mais le classement des histoires que j’ai élaboré s’applique à tous les médiums de fiction : romans, bandes dessinées, séries télévisées… Peu importe le format, ces 64 histoires couvrent l’ensemble des récits que l’on peut raconter. Elles sont présentées sous la forme d’une carte, ce qui permet aux scénaristes de mieux se situer. Ils peuvent ainsi identifier les types d’histoires qu’ils aiment raconter et ceux avec lesquels ils sont moins à l’aise. Cela les aide à trouver leur voie et à affiner leur style narratif !
Thibaud, pour rebondir sur le titre de votre formation « 64 histoires intemporelles », pourriez-vous nous donner votre vision de ce qu’est une « histoire » justement ?
T.M : Une histoire est un récit d’événements structuré autour d’un conflit central. Ce « conflit », qu’on pourrait aussi appeler « le-problème-que-notre-personnage- principal-va résoudre », est issu de l’expérience humaine. Or, ces problèmes, bien que nombreux, ne sont pas infinis.
En avez-vous des exemples ?
T.M : Si vous écrivez une « histoire » où votre personnage résout son problème d’ego, sachez que vous n’êtes pas pionnier·ère en la matière. De nombreux auteur·ice·s ont déjà exploré ce thème avant vous. Maints films et romans ont mis en scène cette difficulté humaine, souvent pour s’en moquer et ainsi créer de la comédie. Ce que vous êtes en train d’écrire n’est donc pas « une nouvelle histoire », mais « une nouvelle œuvre », qui réutilise cette histoire d’égo. Vous y apportez votre style, votre ton, vos personnages et tout ce que j’appelle « l’incarnation » de l’histoire. A travers la formation 64 histoires, vous verrez que nous abordons de très nombreux exemples, parmi lesquels :
- libérer un peuple de lʼoppression (Le Prince dʼÉgypte et Free Guy)
- sʼémanciper de ses parents (Titanic et Dirty Dancing)
- tout quitter et partir se ressourcer pour retrouver la sérénité (Comme un avion et Mange, prie, aime)
- gagner une compétition (Black Swan, Le Grand Bleu)
- sʼélever dans la société (changer de classe sociale) (Illusions Perdues, La Sainte Victoire)
- ou encore résoudre son problème dʼégo (Brice de Nice, Fast Life)
Cette nouvelle approche de la dramaturgie redéfinit-elle le rôle du/ de la scénariste ?
Le premier travail du/ de la scénariste consiste à « mettre à jour » les histoires. Cela signifie leur donner une nouvelle incarnation, une nouvelle peau, et ainsi les moderniser […]. Par exemple, le film Free Guy est une version modernisée de l’histoire du Prince d’Égypte. Tous deux racontent la libération d’un peuple oppressé. Dans Le Prince d’Égypte, il s’agit du peuple hébreu oppressé par le pharaon Ramsès. Dans Free Guy, c’est le peuple des PNJ (Personnages Non Joueurs) qui vit dans un jeu vidéo et qui est oppressé par Antwan, le tyrannique et tout-puissant PDG de la société propriétaire du jeu […]
Proposer une incarnation nouvelle, c’est là que réside la plus-value du scénariste. Cette incarnation doit être pertinente pour notre époque, surprenante et cool !
Le second travail du/de la scénariste consiste à faire cohabiter plusieurs histoires au sein d’une même œuvre (du moins si tel est le projet de l’auteur·ice). J’insiste sur le terme « cohabiter » et non « mélanger ». Les histoires sont des logiques de résolution de problèmes, suivant une série d’étapes logiques. On ne peut pas mêler une étape d’une histoire à celle d’une autre — cela n’aurait aucun sens. En revanche, on peut faire cohabiter plusieurs histoires dans une même œuvre.
Quel conseil pourriez-vous donner à celles et ceux qui ont envie d’écrire ?
Pour les scénaristes qui cherchent à donner du sens à leur histoire, voici un conseil simple : partez de la fin. Définissez d’abord la situation finale, puis remontez jusqu’au début. Le sens de votre histoire se trouve souvent dans ce cheminement entre la situation initiale et la situation finale.
LE PROGRAMME :
Créée par Thibaud Martin, scénariste et directeur littéraire chez France Culture, cette formation vous présentera une nouvelle approche pour inventer et construire des œuvres de fiction. Une approche alternative et opposée à la dramaturgie. Plutôt que de proposer des « principes universels » qui doivent fonctionner pour toutes les œuvres, elle vous fera découvrir les spécificités et les particularités de chaque histoire, ou « logique de fiction », qu’il est possible de raconter. Elle s’appuie sur 5 années de recherche et une analyse de plus de 1000 œuvres de cinéma et de télévision.
Retrouvez plus de détails sur la formation et les dates des prochaines sessions ici.
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